La famille synchronique d’erus est très pauvre.
Le seul dérivé, connu dès les débuts de la littérature latine, est l’adjectif (h)erīlis, dont les occurrences dans les pièces de théâtre (chez Ennius, notamment dans les fragments scéniques, Plaute et Térence) montrent qu’il devait être assez couramment employé dans la langue quotidienne.
D’autres dérivés d’erus sont, en réalité, des hapax formés par analogie avec des lexèmes plus courants. Parmi ces dérivés, un terme erifuga est attesté chez Catulle, mais les autres termes ne sont connus qu’à travers des gloses (eritudo, eritio et eritus ou erit<i>um).
Le composéeri-fug-a, attesté seulement chez Catulle, a le sens d’« esclave qui s’enfuit, esclave fugitif », littéralement « qui fuit son maître » : il est créé analogiquement sur le modèle de trans-fug-a par substitution du préfixe en premier terme de composé, remplacé par eri-, forme prise par erus en premier terme de composé. Le contexte où s’insère le mot créé par Catulle relève de la terminologie opposant les maîtres et les esclaves :
- Catul. 63, 51 : dominos ut erifugae famuli solent.
Le terme eritudo est attesté par la glose de Paul Diacre :
- P.F. 73, 83 L. : eritudo : seruitudo.
Cette glose ne fournit pas d’explication du mot et met seulement en regard deux antonymes : « la condition du maître » et « la condition de l’esclave ».
En revanche, eritudo trouve son explication sémantique dans la glose :
- GLK IV Ps.Plac. E 2 : eritudo : dominatio.
En fait, la glose de P.-Festus nous livre le modèle morphologique d’eritudo : le substantif seruitudo, attesté depuis Tite-Live, alors que seruitus et seruitium sont attestés auparavant, depuis Plaute. Le même eritudo figure dans d’autres gloses :
- CGL V 21, 5 : eritudo : dominatio.
- CGL III 447, 22 ; 480: δεσπoτεία dominatus, dominatio eritudo proprietas.
où il figure parmi un groupe de para-synonymes portant sur les notions de « maîtrise, propriété ».
Une variante possible d’eritudo est heretudo, qui est mentionné sans aucune explication dansGL IV 8, 2.
D’autres gloses témoignent des formes eritio et eritus / erit<i>um, qui posent des problèmes d’analyse morphologique. Il s’agit de formations analogiques, dont les modèles ne sont pas clairs en raison de leur statut de gloses. Ainsi la glose famulatio seruitio eritio dominatio (GL IV Ps.-Plac. F 16) met-elle en parallèle des formations en -tiō(n) /-tiōnis indiquant un état - notamment les couples d’antonymes famulatio et dominatio - avec seruitio et eritio.
Mais seruitio semble être fait sur seruitium (attesté déjà chez Plaute) : si tel est le cas, le suffixe -tio aurait dû s’ajouter au thème de base seruiti-, ce qui aurait donné *serui(ti)-tiō, qui serait passé à seruitiō par haplologie de la séquence ti.
On pourrait penser également à une substitution de finale, le suffixe –itiō (allomorphe de -tiō) se substituant à la séquence -itium sur la même base de suffixation seru-, qui représente le thème du substantif seruus « esclave ». Ainsi, dans cette hypothèse, eritio reposerait-il sur le modèle de seruitio, qui est lui-même une reconstruction à partir de seruitium.
Mais il est également possible de supposer l’existence d’une formation ancienne *eritium, qui serait parallèle à seruitium et qui aurait produit la réfection du couple eritio / seruitio. Cette forme *eritium pourrait être attestée dans la glose eritum : dominium (GL IV Ps.-Plac. E 8), si eritum est à corriger en erit<i>um, comme le suggéraient Goetz et Lindsay, d’après le TLL (s.u. [eritudo]), qui n’exclut pas non plus la possibilité d’une forme eritus.
Le parallèle avec la glose famulatio seruitio eritio dominatio (GL IV Ps.-Plac. F 16) permet de reconstruire la formulation originelle de la glose de P.-Festus de la manière suivante : eritudo < dominatio ut famulatio> seruitudo (selon Sblendorio Cugusi 1991, 112).