dēnuō
6. Histoire du lexème
6.1. Histoire au cours de la latinité. Evolution des emplois
Comme le suggère sa formation (< de nouo), le sens d’origine de denuo est la repetitio eiusdem uel similis actionis (voir Hand 1969 : s.u.). Ce sens est fréquent chez Plaute et durant la période archaïque, mais devient rare en latin classique. Il regagne de la vitalité en latin tardif, à partir d’Aulu-Gelle.
Les trois dictionnaires EM, Gaffiot et TLL s’accordent quant à l’évolution sémantique de denuo: tous posent le sens de « de nouveau », « sur nouveaux frais » (en latin de integro, de nouo) comme premier, comme dans ce vers de Plaute :
- Pl. Most. 117 : aedificantur aedes totae denuo.
Ce sens se maintient en latin post-classique, comme le montre cet exemple de Suétone (cité par Gaffiot) :
- Suet. Aug. 47 alias aut aere alieno laborantis leuauit aut terrae motu subuersas denuo condidit.
Le second sens donné par les dictionnaires est celui de « pour une seconde fois », que denuo partage avec iterum:
- Pl. Rud. 1103 : Dixi equidem: sed si parum intellexti, dicam denuo.
- Liv. 10, 31, 3 : Fabius in Etruria rebellante denuo quattuor milia et quingentos Perusinorum occidit.
De là, denuo a pu aussi être employé comme rursus, au sens de « en sens inverse » (EM) ; il est alors souvent joint explétivement à des verbes en re-, comme dans ce vers de Plaute :
- Pl. Poen. 79 : reuortor rursus denuo Carthaginem.
- Pl. Merc. 856 eundem ex confidente facis actutum diffidentem denuo ;
- Pl. Trin. 884 : aperi …, continuo operito denuo.
« ouvre…, puis referme aussitôt. »
- Pl. Capt. 411 : ut redire liceat ad parentes denuo
Le TLL cite les trois occurrences cicéroniennes de denuo sous ce dernier sens de denuo:
- Cic. Verr. II 1, 37 : recita denuo
- Cic. Verr. II 2, 139 : erat censa praetore Peducaeo ; quintus annus cum in te praetorem incidisset, censa denuost.
- Cic. Cluent. 182 : denuo quaestio de uiri morte habebatur.
Cela confirme que, en Cic. Verr. II 1, 37, denuo ne peut recevoir la même interprétation que iterum « une deuxième fois », doit être compris au sens de « recommencer » (« recommence à lire »), qu’il partage parfois avec rursus. L’ auteur du lemme, Gudeman, pense que denuo, dans cet exemple, pourrait aussi être compris au sens de iterum « pour la seconde fois », mais cette analyse ne serait pas adéquate au contexte.
6.2. Etymologie et origine
La formation de l’adverbe dēnŭō est de date latine : il s’agit de l’agglutination et de la lexicalisation du syntagme prépositionnel dē nŏuō, constitué de la préposition dē « à partir de » (marquant l’origine et le point de départ) suivie par l’ablatif neutre sg. de l’adjectif nŏuus (-a, -um) « nouveau »).
On rencontre donc la même formation – par un renouvellement cyclique – dans la lexie adverbiale française de nouveau ainsi que dans d’autres langues romanes : it. di nuovo, cat. de nou, esp. de nuevo, por.de novo (cf. § 7).
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